La République aux mains des Royalistes, Janvier - Juin 1795

Jusqu’où se portera leur Délire ?

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D’août à décembre 1794, les mêmes hommes conservent le contrôle de la parole et, en apparence, de la Convention. Puis tout se précipite. Comment les Thermidoriens laissent-ils à leur tour échapper le pouvoir ? En août 1794, les Thermidoriens s’allient à un nain. La Droite est squelettique. Puis, entre septembre et novembre 1794, la Convention voit le retour sur ses bancs de bois de près de deux cents députés de Droite ou du Centre, venus prêter main forte aux Thermidoriens. En trois mois, le nain devient un géant. Il arrive que les manipulateurs-arroseurs se retrouvent au mauvais bout du tuyau. Siéyès en fera l’expérience avec Bonaparte. En novembre, la plupart des sections sont aux mains de la Droite et des Royalistes, le Club des Jacobins est fermé. En décembre, les députés Girondins et Royalistes proscrits sont rappelés, Carrier est guillotiné, le Maximum est aboli.La réaction emporte tout.
Bien qu’efficace, la tactique des Thermidoriens ne contient plus la pression réactionnaire. Ils abdiquent devant les revenants de la Droite. Les Thermidoriens se dispersent, ne forment plus une force cohérente et s’éparpillent sur tous les bancs de la Convention. A la remorque du courant dominant, réactionnaire ou modéré, perdant toute crédibilité, ils s’allient même à leur victimes d’hier, Royalistes ou Girondins qu’ils ont pourchassés ! André Dumont, Rovère, Fréron, Tallien, Merlin de Thionville et Bourdon de l’Oise ont rejoint les Royalistes. D’autres sont retournés à gauche. Thuriot, Fouché, Turreau, Laignelot, Panis et même Lecointre, reviennent sièger parmi les Montagnards. La plupart comme Barras, Legendre, Reubell et Bentabole se déterminent au coup par coup, sans ligne directrice.
Les Thermidoriens ne peuvent empêcher le rappel des 73. Les plus lucides des députés l’entrevoient avec inquiétude. Les Montagnards pressentent que ces revenants pleins de haine ne pourront s’oublier devant la tâche commune. Thuriot :“Quel sera l’effet de la rentrée des 73 ? Jusqu’où se portera leur délire ?” Mais les Thermidoriens, mis au défi de prouver leur bonne foi, déstabilisent eux-mêmes un équilibre délicat. En fait, les Thermidoriens ont le choix entre le pouvoir et le pardon. Ils cèdent le pouvoir, libérant ainsi les forces de la Réaction. Une fois ces forces libérées, le couvercle de la marmite s’avère très, très difficile à refermer.
La domination des Thermidoriens a façonné une nouvelle assemblée. Les Montagnards sont marginalisés, tenus à l’écart dans un ghetto qu’on appelle la Crête. Seule consolation, ils s’amusent de voir les Thermidoriens, qui les ont trahis, se débattre dans leurs contradictions. Les Montagnards n’ont plus d’influence. Les personnalités Thermidoriennes sont dispersées. Seuls les centristes, compromis ou non avec les Montagnards, peuvent représenter un contrepoids. Merlin de Douai, Cambacérès, Thibaudeau, Treilhard, Alquier, Debry, Chénier, Mathieu, paraissent former un noyau de “Centre gauche”.
La masse des députés de Droite se mêle à nouveau de politique. Le danger, croit-on, est passé. Officiellement, les “revenants”, les 73 députés réintégrés, se targuent de sérénité et d’esprit de conciliation. En réalité, la plupart d’entre eux n’admettent pas de sièger à côté des responsables de leur malheur et de leur humiliation. D’ailleurs, dans cette affaire, ils considèrent que la Convention ne leur rend pas justice : si la Convention les libére, c’est qu’ils sont innocents, et coupables, ceux qui les ont emprisonnés. Aussi, une nouvelle épuration se prépare-t-elle soigneusement.
Le rappel de 73 députés de Droite, parmi lesquels un grand nombre de Royalistes et de Girondins réactionnaires, bouleverse les données du débat. Les chiffres bruts ne rendent pas compte de la réalité. Bien que peu nombreux, les Thermidoriens ont eu leur heure de domination. Le même phénomène transforme une nouvelle fois la Convention, cette fois au bénéfice des Royalistes. Leur pression, décuplée par la répression d’émeutes populaires parisiennes, va accélérer dans tout le pays, une réaction sanglante.

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