Le Sang des Députés
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Arrestations

01-VENDEMIAIRE

De nos jours, un député mis en état d’arrestation verra la suite de sa carrière politique compromise, sinon anéantie. Même si l’arrestation n’a pas de suite, elle aura pour lui des conséquences catastrophiques. A la Convention, l’arrestation des députés a un effet inverse. Le paradoxe n’est qu’apparent. D’abord, l’arrestation d’un député devient si commune que, loin de scandaliser, elle est un moindre mal.
Le 2 juin 1793, le Girondin Richou, effrayé par les cent mille hommes en armes qui encerclent la Convention, déclare : “L’orage gronde. Sauvez vos collègues. Décrétez l’arrestation des députés que les magistrats accusent.” Pour lui, arrestation égale sauvetage. Dans le même état d’esprit, le député Garilhe réclame au Comité de Salut Public sa propre arrestation tant il craint la redoutable mise hors la loi. De même, le Montagnard Laignelot, en mission en Bretagne, sauve le Royaliste Giroust, qui a fui la Convention, en le faisant arrêter, puis en l’oubliant dans sa prison. Dans cette ambiance où l’on voit des députés rechercher l’abri d’une prison, Saint-Martin-Valogne et Gomaire font figure de miraculés. Dénoncés, arrêtés, accusés, le Comité de Sûreté Générale les fait relâcher et ils ont le courage de revenir à l’assemblée. D’autres aussi passent près de l’irréparable. Le girondin Lecointe-Puyraveau est accusé par Amar au nom du Comité de Sûreté Générale dans la séance du 7 novembre 1793. L’accusation d’Amar s’appuie seulement sur une lettre anonyme. Mais peu importe, plus de vingt girondins ont déjà été guillotinés et Lecointe-Puyraveau est presque seul dans le côté droit de la salle. Les secondes doivent lui paraître longues. Mais le Montagnard Basire le sauve in extremis en faisant valoir qu’un chiffon de papier pourrait alors envoyer n’importe qui devant le Tribunal Révolutionnaire. Dix jours plus tard, Basire est lui-même arrêté. Il sera guillotiné en germinal. Lecointe-Puyraveau, lui, s’enferme dans le silence et ne cherche pas à sauver son sauveur. Un autre miraculé est le girondin Bailleul.En prison depuis cinq mois, il apprend tout à coup qu’il doit comparaître sous peu devant le Tribunal Révolutionnaire. Comme il n’y a pas d’accusation officielle, il s’agit forcément d’une erreur. Mais la justice révolutionnaire n’est pas avare d’erreurs, et d’erreurs irréversibles. On comprend pourquoi Bailleul décide d’agir vite. Il écrit à la Convention. Heureusement, le courrier parvient sous les yeux du président. La Convention interrompt la procédure et réprimande le trop zèlé personnel du Tribunal. D’autres députés, tels Milhaud, Millar, Charlier, et même toute la députation de la Somme, profiteront du désordre et de l’effervescence du moment pour passer sans encombre au travers de dénonciations qui leur valaient à tous au moins l’arrestation.

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