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Pétition

ISNARD

Moins fréquente mais plus exigeante, la présence de pétitionnaires se transforme parfois en épreuve de force. Une des conquêtes de la Révolution, le droit de pétition est sacré. En 1792, il se comprend comme le recueil de signatures, assorti de la présentation de la pétition aux représentants du peuple. Ainsi, « pétitionnaire » signifie aussi « manifestant ». Tous les citoyens peuvent en effet venir en cortège exprimer leurs voeux ou leurs préoccupations devant leurs représentants, chargés d’assurer leur bonheur. Ils sont généralement admis. Ces citoyens peuvent représenter une section, un métier, une colonie étrangère, un sexe, et parfois seulement eux-mêmes. Mais les députés seraient fort mal inspirés de refuser l’entrée aux pétitionnaires. Ce serait se montrer indifférent aux désirs du peuple, auquel ils doivent tout. Le principe est donc louable.
En pratique, le droit de pétition présente des inconvénients: interruption du travail de l’assemblée, médiocre intérêt des pétitions, débat de spécialistes, risque d’affaiblir le prestige de l’assemblée. En 1790, la Constituante a d’ailleurs limité à dix le nombre des pétitionnaires admis. Au contraire, l’assemblée législative accepte les pétitions de toutes origines et un nombre quelconque de pétitionnaires. C’est aussi le choix de la Convention. Toute parcelle du souverain, le peuple, peut en appeler à elle pour résoudre une affaire qui relèverait aujourd’hui des faits divers. Evidemment, le principe ainsi élargi risque de paralyser la Convention. Aussi, il est convenu que toutes les pétitions seront admises le dimanche, puis à partir du 6 octobre 1793, les séances réservées aux pétitions ont lieu deux fois par décade, le quintidi et le decadi. Mais le règlement n’est pas appliqué. Souvent, les pétitionnaires amènent avec eux une furieuse confusion. Admis aux honneurs de la séance, parfois en très grand nombre,ils prennent place parmi les députés ou s’assoient à la place des absents, en dépit du règlement. Souvent, les rangs clairsemés sont envahis par des citoyens, invités … ou non.
Le 27 août 1794, Mallarmé demande l’expulsion de la salle des femmes et des individus étrangers à la Convention qui ont pris place sur les bancs des représentants du peuple ! Le lendemain, nouveau désordre. La tribune réservée aux suppléants est occupée par le public. Les suppléants demandent à descendre à la barre, là où doivent se tenir les pétitionnaires qui eux-mêmes siègent à côté des députés !
Les délégations des Jacobins ou de la Commune sont écoutées avec attention, respect ou méfiance. Les adresses inoffensives ou anodines comme celles des glorieux militaires qui apportent les drapeaux pris à l’ennemi, jouissent de la bienveillance d’une assemblée détendue. D’autres pétitionnaires mettent l’assemblée hors d’elle même. Jacques Roux, chef des Enragés, sermonne les députés: « Vous n’avez pas tout fait pour le bonheur du peuple ! ». Tel autre, des Cordeliers, qui ose parler à l’assemblée chapeau sur la tête, est attaqué par Robespierre.Un autre qui chante des couplets patriotiques est pris à partie par Danton qui refuse qu’on « change la tribune en tréteaux ». Un autre encore, qui propose de mettre « la mort à l’ordre du jour », est chassé de l’assemblée. Tous ont pour résultat d’enflammer une assemblée déjà si inflammable. Ainsi, Dubois-Crancé explose à la face de pétitionnaires qui ne lui conviennent pas: »Allez vous faire foutre, brigands que vous êtes ! ».
En fait, de plus en plus, parmi les pétitions spontanées, se glissent des pétitions téléguidées. Les députés croient de moins en moins à la sincérité des pétitionnaires. C’est ainsi que Thomas Lindet est accusé d’avoir payé les pétitionnaires venus réclamer la libération de son frère Robert Lindet. De plus, comme il est parfois difficile de distinguer un pétitionnaire d’un émeutier, sur proposition du girondin Pénières, la Convention renoue avec la Constituante et, le 19 avril 1795, limite à vingt le nombre des pétitionnaires admis. Dans la foulée, elle limite également le nombre des spectateurs des tribunes. Ceux qui dominent la Convention à ce moment là apprécient peu les mouvements de foule.

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