Le Sang des Députés
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Fuites

HERAULT-DE-SECHELLES

La démission étant suspecte, l’arrestation aléatoire, l’accusation toujours possible, beaucoup cherchent le salut dans la fuite. Au début, la fuite des députés arrêtés est favorisée par la Convention elle-même.Les chefs girondins arrêtés qui n’ont pas fui sont ceux qui ne le voulaient pas. Par la suite, les arrestations sont plus rigoureuses et il n’est plus question de laisser les députés arrêtés chez eux à la garde bonhomme d’un gendarme débonnaire.
Les fuites sont donc mieux préparées et anticipent souvent sur une probable arrestation. Savary subit un interrogatoire serré au Comité de Sûreté Générale. Il est innocenté et relâché provisoirement. Savary en profite aussitôt pour disparaître dans la nature. C’est parfois la rançon du courage, contrairement aux apparences. Ainsi, pendant deux mois, vêtu d’un déguisement, Vallée rend visite dans sa prison à Madame Roland, l’inspiratrice des Girondins. Il la réconforte et recueille ses mémoires. Deux mois plus tard, elle est éxécutée. Vallée ne se cache qu’une fois son stratagème découvert.
Quand l’arrestation est décrètée, il reste la possibilité de ne pas se présenter et de rentrer dans la clandestinité. Saurine est très occupé à rechercher un local pour le Comité de Salut Public pendant la journée du 3 octobre 1793. Le 4 octobre, il se présente, fier d’avoir rempli sa mission. Seulement, il apprend incidemment qu’il a été décrèté d’arrestation la veille comme signataire de la protestation contre le coup d’état du 2 juin. Aussitôt, il organise sa disparition, non sans avoir adressé une justification à la Convention : “Je ne crains aucun tribunal, mais je dois craindre les prisons où les coupe-têtes menacent chaque jour de porter leurs poignards.”
Les députés en fuitese terrent en attendant des temps meilleurs. S’ils montrent le museau, ils seront guillotinés. L’un d’entre eux n’accepte pas cette existence de rat d’égout. Duchastel, député Girondin de 27 ans, écrit au Comité de Salut Public : “Messieurs, votre dessein est de me faire couper le col. Je suis loin de le trouver mauvais… Pour vous faciliter donc les moyens de me conduire à l’échafaud,… je vous déclare qu’au lieu de me cacher, je me montrerai à découvert… fidèle au serment de vivre libre ou mourir.” Duchastel tient parole. Il est guillotiné le 31 octobre 1793.
A l’opposé, Gaudin est l’exemple typique du député du Marais. Epuisant toutes les ressources disponibles afin de ne pas se attirer l’attention. Néanmoins, indigné par la mort du Roi, il traite les députés d’assassins. Regrettant vite son audace, il demande et obtient un congé. Il rentre chez lui, en Vendée, et, pendant quatre mois, cherche à se faire oublier. Hélas ! La Vendée se soulève. La Révolution revient frapper à la porte de Gaudin. Investi par la Convention d’une mission sur place, il s’en acquitte au mieux. Mais son action ne convient pas à tout le monde. Il est dénoncé à la Convention et y est rappelé. Au lieu de se mettre en lieu sûr, il regagne docilement Paris. Il se fait tout petit, et observe un mutisme absolu. La fatalité s’acharne. Gaudin est à nouveau dénoncé en mars 1794 et, cette fois, décide de se cacher. Il attendra neuf mois avant de pousser le plus grand soupir de soulagement de son existence.

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