Organisation

Comités Spécialisés

GREGOIRE

En fait, l’oeuvre de la Convention prend naissance dans les délibérations de tous les comités spécialisés, élus au début de la session.
Parmi eux, le plus important est le Comité de Constitution, un des six premiers Comités de la Convention.L’élection de ses membres le 29 septembre 1792 traduit les sympathies de l’assemblée à ses débuts. Les neuf élus sont Condorcet, Pétion, Brissot, Vergniaud, Gensonné, Barère, Siéyès, Danton et Thomas Payne. Ce comité est choisi par la majorité girondine et compte un seul Montagnard : Danton. A noter que, seul, Sièyès parviendra sans encombres à la fin de la session et que seul, il refuse le suffrage universel.
Le Comité de Constitution accomplit un immense travail sous l’impulsion de Condorcet. Son projet est compliqué et progressiste à la fois. Il pouvait être une base de discussion pour conclure un accord avec les Montagnards. Mais les luttes de parti brouillent les cartes. Quand le projet de Condorcet arrive en discussion, les positions sont tranchées. Le compromis n’est plus possible. A la chute des Girondins, le comité de Constitution est supprimé. La Constitution des Montagnards sera élaborée par le Comité de Salut Public
Les comités spécialisés de la Convention ont changé de nom et de nombre. D’importance variable, ils ont été regroupés ou séparés selon les circonstances. C’est là le lieu du travail de fond de la Convention. Leur nombre a varié entre six et vingt. Certains sont d’importance mineure comme le Comité des Inspecteurs de la salle qui veille à la bonne marche matérielle de l’assemblée. D’autres sont essentiels du point de vue idéologique comme le Comité de l’Instruction Publique.
Leur personnel a varié mais dans une moindre proportion que les comités de gouvernement. Car leurs membres ne participent pas directement au pouvoir. Les Comités spécialisés peuvent et doivent voir plus loin. Leur rôle est de concrétiser les idées agitées dans l’assemblée. A cet effet, ils ont un travail de réflexion approfondie. Ils présentent des projets de décret sous forme de rapport sur lesquels la discussion s’engage. L’immense travail de ces comités spécialisés, mené loin de la tribune, est dû à des députés souvent obscurs, mais de grand mérite. Les délibérations de ces comités, à la fois sérieuses, désintéressées et sincères, bénéficient d’un calme relatif. C’est là que se développe le débat d’idées, qu’avancent les projets, que se construit l’avenir de la démocratie.
Cependant, comme l’orage gronde tout à côté, le député moyen justifie par le travail en comité ses absences de la Convention. Indéniablement, des députés réfractaires au combat pour le pouvoir, cherchent refuge dans les Comités spécialisés. Quand les députés les plus influents se taisent ou calculent leurs interventions, eux ne craignent pas de parler à la tribune. Ils ne gênent personne. Les sujets qu’ils développent sont soit secondaires, soit techniques, soit informels, soit tout cela à la fois. L’attention de l’assemblée est relative. Par exemple, lors des chaudes journées de Thermidor, les rapporteurs des Comités spécialisés ou “apolitiques” sont presque tous des députés incolores. Entre le 6 et le 12 Thermidor An II, aucun nom saillant ne figure parmi les rapporteurs des comités spécialisés. Sur 18 députés concernés, un seul a été président de la Convention. De toute façon, ces jours-là, la Convention a la tête ailleurs.
Comme le personnel de ces comités a peu changé, certains liens se tissent entre les membres, même d’opinion opposées. Au Comité des Finances, Ramel, Cambon, Johannot et Mallarmé forment presque une “bande”. Au Comité des Colonies, Fouché gagne l’amitié de Barras, amitié qui lui sera bien utile par la suite.
En principe, les députés appartiennent à un comité et un seul. Pendant une période, Julien de Toulouse appartient simultanément à cinq Comités différents. Quand on sait que le règlement admet exceptionnellement l’appartenance à deux comités, on peut s’interroger sur cette fringale. A l’inverse, d’autres députés n’appartiennent à aucun comité. Comme de plus, ils ne prennent jamais la parole, on peut là se demander à quoi Martin et Rous par exemple, passaient leurs journées.
A l’ensemble des comités, il convient d’ajouter les nombreuses commissions provisoires. Ces commissions sont l’équivalent des Commissions d’enquête actuelles. Elles sont créées pour un objet précis, limité dans le temps. Selon l’importance stratégique de leur mission, les députés qui s’y font élire sont plus ou moins marquants. Cas particulier, la Commission des Onze (avril-août 1795), est en fait un nouveau Comité de Constitution qui ne veut pas dire son nom.Les Conventionnels les plus en vue du centre et de la droite la composent. Elle rédige la Constitution de l’An III.
Certaines commissions ont joué un rôle éphémère mais décisif. La Commission des Douze a précipité la chute des Girondins après treize jours d’existence. La Commission des Cinq n’a pas duré plus longtemps mais a préparé un coup d’état dans les derniers jours de la Convention. En quinze jours, la Commission des Subsistances révolutionne toutes les lois économiques : elle fait voter la Loi du Maximum des Prix et des Salaires. Autre Commission à responsabilité : la Commission qui aboutit à la mise en accusation de Louis XVI et à son jugement par l’assemblée.
D’autres commissions, dites des Vingt et Un, examinent les accusations portées contre des députés. Leurs conclusions furent fatales à Carrier et à Lebon, guillotinés. Les membres des anciens Comités Billaud-Varenne, Collot d’Herbois, Barère, Vadier, furent condamnés à la déportation. La commission réunie pour examiner les papiers de Robespierre après sa mort fut noyautée par les Thermidoriens. Elle risquait de compromettre beaucoup d’anciens adulateurs de l’Incorruptible.Lses Thermidoriens s’assurèrent de sa discrétion, désamorçant ainsi la bombe de révélations scandaleuses. Les missions de ces commissions sont donc éminemment conjoncturelles.

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