Tous les articles par Philippe Hernandez

Du bon usage du Panthéon

CHENIER

Par décret du 4 Avril 1791, soit deux jours après la mort de Mirabeau, l’Assemblée Constituante a créé le Panthéon et la dépouille du grand homme y a été placée aussitôt. Seulement, à l’époque, la corruption de Mirabeau reste ignorée. Plus tard, le jour se fait sur le personnage mais Mirabeau reste en place. (La Révolution a d’autres préoccupations)

Le 13 Juillet 1793, Marat est assassiné. Deux décrets du 14 et du 25 Novembre 1793 le destinent à son tour au Panthéon. Là encore, le temps passe jusqu’au 21 Septembre 1794, date à laquelle la dépouille de Marat entre au Panthéon alors que conformément aux mêmes décrets, Mirabeau en sort « par une porte latérale » (Le Moniteur) L’aller-retour de Mirabeau ne semble pas préoccuper les contemporains.

Pourtant, la coalition réactionnaire dominant la Convention, soutenant notamment les Comités de gouvernement dont les Montagnards sont absents, obtient l’expulsion de Marat du Panthéon. Pour y parvenir, ces Comités encouragent la Jeunesse Dorée, suscitent des pétitions de sections parisiennes – plus ou moins sous contrôle royaliste -, font valoir que les bustes de Marat, d’ailleurs détruits ou jetés dans le caniveau,  donnent lieu à des rixes scandaleuses, mécaniquement attribuées aux Jacobins. Au nom des trois Comités, l’ex-maratiste André DUMONT fait ainsi approuver le 8 Février 1795 un Décret habilement non nominatif qui fixe une règle devenue définitive : désormais, «  les honneurs du Panthéon ne pourront être décernés à aucun citoyen (…) que dix ans après sa mort. » Et pour que le décret s’applique rétroactivement à Marat, le décret précise : « Tout décret dont les dispositions seraient contraires est rapporté. ».

Clairement, l’aller-retour de Marat a donné à réfléchir. Le lendemain d’ailleurs, des sections parisiennes défilent pour féliciter la Convention d’avoir épuré le Panthéon et de ne plus permettre les « grands hommes provisoires ».

Marat aurait approuvé ce décret car, ironie de l’Histoire, Marat avait attaqué le général Dumouriez, alors immensément populaire, vainqueur de Valmy et de Jemmapes, en disant : « Je veux voir la fin de sa carrière avant de le féliciter. » Bien vu, Marat : quelques mois plus tard, en Avril 1793, Dumouriez trahit et passe à l’ennemi

Aujourd’hui, François Hollande fait entrer au Panthéon quatre grands résistants, morts depuis plus de dix ans. Très bien. On peut y voir une petite manœuvre politicienne mais rien de grave. En revanche, on peut regretter que cette règle des dix ans, valable pour le Panthéon, ne s’applique pas pour une multitude de stades, piscines, rues, complexes sportifs et toutes sortes d’établissements qui portent le nom de personnes vivantes. On est loin de la sagesse acquise par nos anciens dans une période quelque peu agitée.

 

 

 

Le panache : de la fiction et à la réalité

10-MESSIDOR

Il est des rencontres étonnantes entre la fiction et la réalité historique. Ainsi, Edmond Rostand a créé en 1897 le personnage de Cyrano de Bergerac sans se douter que certains traits de caractère de son héros fictif (même si le personnage a existé) pouvaient dépeindre un homme réel qui a vécu de 1749 à 1813, le Conventionnel JEAN BON SAINT ANDRE.

Cyrano de Bergerac, dans la pièce éponyme, Acte I, Scène IV, se trouve confronté à des moqueries sur son accoutrement de la part d’un Vicomte. Il faut ici citer quelques vers de Rostand.

Le Vicomte : « Ces grands airs arrogants ! Un hobereau qui…qui… n’a même pas de gants ! Et qui sort sans rubans, sans bouffettes, sans ganses !

Cyrano : Moi, c’est moralement que j’ai mes élégances. (…) Mais je marche sans rien sur moi qui ne reluise, Empanaché d’indépendance et de franchise. (…) Je fais en traversant les groupes et les ronds sonner les vérités comme des éperons. »

Or dans ses Mémoires, le Comte Beugnot détaille une scène à la cour de Napoléon dans laquelle JEAN BON SAINT ANDRE tient le rôle de Cyrano. Beugnot n’est pas suspect de partialité : il était royaliste constitutionnel quand JEAN BON SAINT ANDRE votait la mort de Louis XVI. La scène se déroule à Mayence, à l’été 1813.

« Le salon de service était peuplé, d’aides de camp, de chambellans, d’officiers d’ordonnance, de secrétaires, distingués entre eux par des habits plus ou moins riches et d’une élégance recherchée. (…) Le vieux Conventionnel faisait tache au milieu du tableau avec son costume de préfet le plus modeste possible (…) et le reste de son habillement en noir (…) Il avait éprouvé plus d’une fois à ce sujet les aimables moqueries de la bande dorée (…) Il leur répondit avec un sang-froid qui ajoutait à la puissance du discours :

« J’admire en vérité que vous ayez le courage de vous occuper de mon costume et de la couleur de mes bas, le jour où je dois dîner avec l’Empereur et l’Impératrice. (…) Je n’aurais pas sitôt le dos tourné que vous direz : « En vérité, on ne conçoit pas l’Empereur de faire dîner avec (…) la nouvelle Impératrice, un Conventionnel, un votant, un collègue de Robespierre au Comité de Salut Public, et qui pue le Jacobin une lieue à la ronde. » (…) L’Europe était alors conjurée contre la France, comme elle l’est aujourd’hui. Elle voulait nous écraser (…) Eh bien, les rois en ont eu le démenti ; nous avons dégagé le territoire et reporté chez eux la guerre d’invasion. (…) Nous avons (…) forcé ces mêmes rois à venir humblement nous demander la paix. Savez-vous quel gouvernement a obtenu ou préparé de tels résultats ? Un gouvernement composé de Conventionnels, de Jacobins forcenés, coiffés de bonnets rouges, habillés de laine grossière, des sabots aux pieds (…) et qui se jetaient sur des matelas étalés par terre dans le lieu de leurs séances quand ils succombaient à l’excès de la fatigue et des veilles. Voilà quels hommes ont sauvé la France. J’en étais, messieurs, et ici, comme dans l’appartement de l’Empereur où je vais entrer, je le tiens à gloire. (…) Au surplus, attendons quelque temps : la fortune est capricieuse de sa nature. Elle a élevé la France bien haut ; elle peut tôt ou tard la faire descendre, qui sait ? aussi bas qu’en 1793. Alors on verra si on la sauvera par des moyens anodins, et ce qu’y feront des plaques, des broderies, des plumes et surtout des bas de soie blancs. »

JEAN BON SAINT ANDRE, dans cette tirade, fait immanquablement penser à Cyrano et montre un panache admirable. Il peut se le permettre, par ce qu’il a vécu et par ce qu’il a accompli dans l’Histoire. De plus, tel Cyrano qui se sacrifie pour Roxane, il se sacrifie pour les soldats français. Son dévouement le mène en effet à la mort quelque mois plus tard en soignant les blessés contagieux de retour de la gigantesque bataille de Leipzig, qui sonne le glas de la dictature impériale. Malgré les bas de soie blancs.

 

Le beau mot de Républicains

GENSONNE

Ainsi l’UMP va devenir sous peu « Les Républicains ». Le parti politique de la Droite change une fois de plus de nom sous l’impulsion de son Président Nicolas SARKOZY. Mais pourquoi « Les Républicains » ?

 

Ne cherchons pas l’inspiration du côté des Etats-Unis : la référence à la division traditionnelle de la vie politique américaine entre Républicains et Démocrates n’est pas pertinente en ce qu’elle est ignorée d’une immense majorité de Français auxquels précisément l’ex-UMP s’adresse.

 

Plus grave, ne cherchons pas d’avantage l’inspiration du côté d’un éventuel retour aux sources de la « proclamation » de la Première République. D’abord, Nicolas SARKOZY ignore lui-même très probablement dans quelles circonstances exceptionnellement difficiles la République est entrée dans l’Histoire. De même qu’il ignore que la République a été déclarée Une et Indivisible le 25 Septembre 1792 à l’initiative de DANTON et que le triptyque républicain « Liberté, Egalité, Fraternité » fut conçu par MOMORO, popularisé par ROBESPIERRE, officialisé par PACHE. Peu lui chaut.

 

On ne peut pas croire davantage que la revitalisation des valeurs républicaines, mises à mal par les attentats du 7 Janvier, soient à l’origine de ce choix.

 

Cependant, il reste que l’ignorance et le mépris n’empêchent pas la captation d’héritage. En effet, à bien y réfléchir, que la Droite s’approprie les Républicains et leur Histoire forme un formidable contresens historique. L’Histoire de la Droite sous toutes ses formes, sociale, cléricale, militariste, se confond pendant près de 150 ans avec l’opposition à la République, du soutien à Bonaparte jusqu’au soutien à Pétain. D’ailleurs, Jean-Noël JEANNENEY, comme d’autres personnalités de gauche, s’en plaint à juste titre.

 

Peine perdue. D’une part, d’autres partis ont utilisé le mot « Républicain » dans les décennies récentes (Républicains Indépendants, Parti républicain, etc.) sans susciter de réaction. D’autre part, l’unanimité s’est faite désormais autour de la République.

 

Au fond, ce mot magnifique est vidé de son sens par le simple fait que Nicolas SARKOZY veut – en façade – rassembler, et surtout ne plus cliver. On ne peut voir dans cette opération qu’un coup cynique de marketing politique. Tactiquement, il oblige ses concurrents à suivre ses traces.

 

Sans être dupe, on ne peut que s’incliner devant cette habileté déployée au service d’un artiste de l’ambition personnelle. Bien joué, l’artiste.

Quarante jours d’orage

SAINT-MARTIN-VALOGNE

Par les temps qui courent, le mot « crise » s’applique à tout et à tous propos. A l’aune de périodes passées, l’abus du mot crise devient presque risible. Qu’on en juge.

10 Août 1792 : suspension du Roi Louis XVI

20 Septembre 1792 : fin de l’Assemblée Législative.

Entre les deux, quarante jours, comme un déluge… de catastrophes.

 

Pour l’essentiel, la France doit résoudre alors, simultanément et urgemment, un double problème de légitimité constitutionnelle, un double problème militaire et un double problème d’ordre public. Pas moins !

 

Au plan constitutionnel, l’Assemblée Législative, élue en Septembre 1791 pour faire fonctionner la Constitution, entérine la suspension du Roi et la fin de la Constitution. Or, en dehors du souci de leur sauvegarde personnelle, les deux tiers des députés considèrent que, élus dans un cadre constitutionnel déterminé, ils ne peuvent légalement continuer de siéger. Ils quittent l’Assemblée. Le tiers restant de l’Assemblée, environ 250 députés, assume cette contradiction du viol de la Constitution au nom du salut public. L’Assemblée pâtit donc de cette illégitimité originelle, illégitimité à la fois du point de vue du nombre minoritaire de députés en séance et de celui de la violence qui les a menés à un pouvoir sans roi.

Par ailleurs, la Commune de Paris, qui s’est arrogé le mérite de la chute du Trône, et qui fait valoir ses martyrs, exerce une pression immense, à grands renforts de pétitions menaçantes, sur l’Assemblée soupçonnée de mollesse. La Commune veut frapper vite et fort et outrepasse ses pouvoirs. Quarante jours d’une intense concurrence politique débutent alors.

 

Au plan militaire, la France est envahie. La Patrie a été déclarée en danger le 11 Juillet 1792 mais les volontaires enrôlés rejoignent le front peu à peu. L’insolent Manifeste de Brunswick, connu à Paris le 3 Août ajoute à la fermentation révolutionnaire. Surtout, la trahison gangrène toute la hiérarchie militaire et administrative. Le Général en Chef La Fayette a déserté son armée le 19 Août avec une grande partie de son Etat-major. Malgré les ordres de l’Assemblée, la municipalité de Sedan lui vient en aide. Des places fortes réputées sont prises par l’ennemi autrichien et prussien. Les villes et citadelles de Longwy le 23 Août et Verdun le 2 Septembre se rendent presque sans combattre. Ces municipalités, et d’autres, trahissent et désorganisent la défense du territoire. Invasion et trahisons : tous les excès sont à craindre.

 

Car, dès la chute du Trône, on pourchasse et massacre partout dans Paris les mercenaires Suisses qui défendaient les Tuileries au 10 Août. La Commune cherche des traîtres, réquisitionne, perquisitionne, organise des visites domiciliaires, remplit les prisons. L’Assemblée, qui cherche à contrôler l’agitation, crée le 17 Août un Tribunal Extraordinaire, chargé de juger les crimes contre-révolutionnaires. Ce nouvel ordre judiciaire doit neutraliser la menace d’une anarchie sanglante que fait planer la Commune de Paris.

Le contraire se produit. Ce nouveau Tribunal , très lent à condamner, se prend à acquitter des hommes connus comme complices des contre-révolutionnaires. De plus, la conjonction de nouvelles désastreuses amène le Comité de Surveillance de la Commune à financer des commandos de sabreurs avinés pour appliquer une justice expéditive dans les prisons surpeuplées. On déplore environ mille morts, en deux jours, les 2 et 3 Septembre, dans les prisons parisiennes, la plupart sans jugement. L’Assemblée n’a pas pu ou voulu empêcher le massacre.

Moins sanglant, le vol du Trésor de la Couronne, un des plus grands cambriolages de tous les temps, le 17 Septembre, illustre l’immense désordre qui sévit alors.

L’ordre judiciaire et l’ordre public ainsi bafoués, l’Assemblée poursuit sa tâche. Et c’est là le plus étonnant de cette période plus que troublée. Pendant ces quarante jours, le « tiers maintenu » de l’Assemblée Législative organise la convocation au SUFFRAGE UNIVERSEL de la Convention Nationale, instaure le DIVORCE par consentement mutuel, ainsi que l’ETAT CIVIL LAÏC.

Au final, le « tiers maintenu » de l’Assemblée a légué à la postérité des conquêtes politiques immenses et irréversibles dans un temps où tout paraissait devoir s’effondrer. Ce legs, constitué en une durée infime au regard de l’Histoire, forme un concentré de progrès, obtenu malgré ou grâce à une Crise sans exemple.

 

Dans cette Crise, des hommes déterminés ont su faire face, malgré les dangers, les humiliations, l’illégalité de leur situation. Ils se retrouveront, pour deux cent un d’entre eux exactement, au sein de la Convention Nationale.

Vive le 49-3 !

07-GERMINAL

Un Article de la Constitution permet de faire adopter une Loi sans vote. Tout récemment, le Gouvernement a recours à cet Article. Les critiques pleuvent.

Il faut savoir : ou bien l’Article 49-3 figure dans la Constitution et le Gouvernement a toute légitimité pour l’utiliser. Ou bien, si chacune de ses utilisations est perçue comme un « déni démocratique » (François HOLLANDE en 2006) ou un « coup d’Etat » (Christian ESTROSI en 2015), il faut d’urgence le supprimer de l’édifice constitutionnel.

 

En réalité, on le voit, les postures prennent le pas sur le souci de l’intérêt général. Car c’est de cela qu’il s’agit. A quoi sert le 49-3 ? A assurer la stabilité gouvernementale. Grâce à cet Article, la Vème République assure au moins un minimum de continuité dans l’action politique. Comparativement aux IIIème et IVème Républiques, c’est un immense progrès.

 

Sans juger sur le fonds la Loi ainsi approuvée, il faut au moins admettre que la marche des institutions permet de protéger le gouvernement contre une coalition des extrêmes toujours à craindre. Avec l’Article 49-3, il ne suffit pas d’une majorité négative capable de mettre le gouvernement en minorité. Il faut encore une majorité positive, dans cadre du vote d’une Motion de Censure, soutenant un projet commun. Ainsi, le Front de Gauche se ridiculise, voire perd son âme, en faisant alliance avec l’UDI et l’UMP, comme si ces partis allaient demain gouverner ensemble. La position du Front de Gauche connaît d’ailleurs un succès limité : cinq députés sur quinze ont voté la motion de  Censure. La convergence des extrêmes a handicapé très lourdement la  IVème République, dont les institutions manquaient de défense contre l’alliance contre nature des gaullistes et des communistes

 

Le gouvernement de la Convention Nationale a pâti lui aussi d’une instabilité d’autant plus dommageable que le pays vivait les plus grands désordres et les plus grands dangers.

Même si de grands historiens considèrent que le redressement national et la Terreur n’ont aucun lien de cause à effet, les faits et la chronologie sont têtus. C’est bien entre Septembre 1793 et Juillet 1794 que la Première République parvient à s’extirper du piège mortel de la coalition militaire soutenue par une bonne moitié de l’Europe monarchique. Les mêmes hommes composent le Comité de Salut Public pendant ces dix mois. Peut-on imaginer l’incroyable sursaut républicain de l’époque sans cette stabilité au sommet ?

Très difficilement.

 

Quand la Convention remet en cause cette stabilité, en Août 1794, avec notamment le renouvellement mensuel par quart du Comité de Salut Public, l’élan militaire impulsé depuis l’été 1793 continue de produire ses effets.

 

Aussi, aujourd’hui, d’évidence, l’Article 49-3, sans être suffisant, paraît nécessaire à la conduite d’une politique quelque peu ambitieuse et responsable.

Par pitié, qu’on nous évite ces pertes de temps quand les défis s’accumulent !

Sacrilège

CHABOT

Les épouvantables évènements récents renvoient aux principes fondateurs de notre République, notamment la Liberté d’expression, l’Education  et la Laïcité. La République esté ébranlée par le massacre de la rédaction de Charlie Hebdo. Les autres attentats, aussi abominables qu’ils soient, n’ont pas le même impact. L’antisémitisme des assassins avait, hélas, fait déjà d’autres victimes.

 

Mais avec l’assassinat de talents créatifs, de dessinateurs impertinents, d’artistes inoffensifs, de célébrités aussi, peu ou pas protégées d’ailleurs, les meurtriers s’attaquent au  totem républicain de la liberté et commettent un sacrilège. C’est la première fois depuis près de 250 ans qu’on tue en France au nom d’une religion, depuis les meurtres judiciaires de Callas en 1762, du Chevalier de la Barre en 1766.  Comme alors, un prétendu blasphème motive l’horreur.

 

Tant de questions fusent désormais sur la Liberté, la place des religions, les valeurs républicaines communes, l’intégration. Tant mieux si une prise de conscience émerge de ce désastre, si ces principes républicains, trop souvent mollement revendiqués et défendus, regagnent leur vigueur d’origine.

 

De quoi s’agit-il  à l’époque de la Convention ?

Les Conventionnels sont marqués par la terrible guerre de Vendée, par les atrocités commises par les Vendéens au nom de Dieu et pour la défense du Roi Très Chrétien. L’Armée Catholique et Royale exerce sur le territoire qu’elle contrôle un pouvoir barbare. Les prêtres réfractaires jouent un rôle d’incendiaires auprès de populations superstitieuses et très majoritairement analphabètes. Le pouvoir absolu des prêtres impose partout où il s’installe l’adhésion à leur foi, leur dogme, leurs croyances.

Après deux ans de guerre civile, un répression inouïe et la victoire finale des républicains, la Convention veut rassembler la Nation et panser les plaies.

Cependant, sa politique n’a rien d’angélique en ce qu’elle identifie les responsabilités : une religion dominante aux  innombrables affidés guidés par des chefs intéressés au maintien de l’ignorance.

 

Ce constat établi et largement partagé, Cambon, député de l’Hérault, lance une première salve au nom du Comité des finances et fait décréter le 18 Septembre 1794. « La République Française ne paie plus les frais ni les salaires d’aucun culte. »

Surtout, le 21 Février 1795, au nom des trois plus influents Comités de la Convention, Salut Public, Sûreté Générale et Législation, Boissy d’Anglas, député protestant de l’Ardèche, applique le principe de laïcité et établit la Séparation des Eglises et de l’Etat. L’expression n’est pas employée mais la chose naît ce jour-là. Il n’est question officiellement que de « police des cultes ».

D’abord, sans surprise, Boissy d’Anglas rappelle la guerre de Vendée.

« Vous avez gémi trop longtemps des maux affreux de la Vendée. (…) Le fanatisme en fut le mobile, les opinions religieuses l’occasion et le prétexte. On égara les hommes pour les perdre. On les persécuta pour les rendre cruels et féroces. (…) On veut armer les citoyens contre les citoyens, et les Français contre les Français, et condamner une partie de la France à être la victime des  erreurs ou du ressentiment de l’autre. »

Quelle résonance en ce mois de Janvier 2015 !

Boissy d’Anglas continue et développe les leçons à en tirer : « On fait cette injure au Dix-Huitième siècle de croire qu’il puisse être encore souillé par une guerre de religion. (…) Le Législateur (…) doit contempler avec calme les agitations qui sont nées des opinions religieuses et leur influence terrible sur le sort de l’espèce humaine. »

Boissy d’Anglas dénonce « les maux affreux dont la religion a été la source. » mais il table sur « le temps », « l’expérience » et « la philosophie » pour lutter contre les « opinions surnaturelles » ; « Il n’y a que la raison seule qui puisse triompher de l’erreur. »

Boissy d’Anglas indique un premier remède : « Vous l’avez expulsée [la religion] à jamais de votre organisation politique. (…) Citoyens, le culte a été banni du gouvernement, il n’y rentrera plus. »

Puis un second ; « Vous avez organisé l’instruction publique, et c’est l’instruction qui peut seule, en développant la raison, renverser les préjugés et les erreurs. »

Mais cela ne suffit pas car la Convention sait qu’il y a urgence.

Boissy d’Anglas dresse du péril un  portrait étonnamment actuel ; « C’est dans les lieux sombres et déserts, où les hommes religieux se retirent (…), qu’ils ouvrent leurs âmes à ces affections lugubres qui la plongent dans une habitude de démence et de férocité, qu’on appelle fanatisme. (…) Il faut des martyrs à la religion. »

Bref, l’Etat doit se défendre et contrôler les assemblées cultuelles.

« les cultes, quels qu’ils soient, n’auront de vous aucune préférence. (…) ne considérant la religion que comme une opinion privée. (…) Les édifices publics ne peuvent être prêtés à aucune secte. (…) Votre police doit s’étendre sur la morale qui sera répandue dans les assemblées destinées aux cérémonies d’un culte particulier ; cette morale ne doit jamais être en opposition avec les lois de l’Etat, avec les principes du gouvernement. (…) Les cris séditieux seront punis, soit qu’ils s’échappent de la bouche des prêtres, des sectaires, des fanatiques, (…) »

Que peut-on dire de plus aujourd’hui quand cet aspect des choses revient dramatiquement au premier plan ? Il faut avoir à l’esprit que cette Loi du 21 Février 1795 exige plus des religions que la fameuse Loi de 1905. Les Articles V et VII proscrivent l’usage en public des «habits, ornements et costumes affectés à des cérémonies religieuses. »

Mais surtout, l’Article VI mérite d’être cité intégralement : « Tout rassemblement de citoyens pour l’exercice d’un culte quelconque est soumis à la surveillance des autorités constituées. Cette surveillance se renferme dans des mesures de police et de sûreté publique. »

Aujourd’hui, le défaut de « police des cultes » s’est fait cruellement sentir. Les imams fondamentalistes remplacent les prêtres fanatiques d’hier. Daech travaille sur le même terrain d’ignorance que l’Armée Catholique et Royale. Une théocratie contrôle un territoire entier. Des financements extérieurs parviennent en France à des prédicateurs malfaisants. Au delà du difficile arrière-plan social et éducatif, qui méritent attention et efforts dans la durée, la République doit sans délai repérer ses ennemis et savoir ce qu’ils trament. Sans doute, la liberté individuelle ne doit pas en pâtir. Mais, compte tenu des évènements récents, pourquoi renoncer a priori à une police des cultes qui opèrerait notamment dans certaines prisons et mosquées ?

2014 = 1799 ?

HERAULT-DE-SECHELLES

C’est peu de  dire que ceux qui ont entouré François HOLLANDE, ne sont pas toujours tendres avec lui. Le propos n’est pas de mesurer le bien fondé des critiques mais d’envisager les conséquences de ces dénigrements répétés et de ces attaques « ad hominem ».

 

En peu de temps, aux confins de la politique et du spectacle, on a vu au moins trois sources de fiel se manifester :

  • des anciens ministres (Delphine BATHO, Cécile DUFLOT, Arnaud MONTEBOURG, Benoit HAMON, Aurélie FILIPETTI),
  • de supposés alliés aux élections (Jean-Luc MELENCHON, Pierre LAURENT)
  • et des intimes (Valérie TRIERWEILER)

cracher leur venin à travers des livres et des déclarations publiques. Tous font passer leur « ego » avant l’intérêt général. Que leur ressentiment soit ou non justifié, ils sont incapables de répondre à des questions simples : « Pourquoi avez-vous suivi et accepté les propositions de François HOLLANDE ? Pourquoi avez-vous soutenu  un homme si lamentable ? »

 

En mai et juin 1799, de la même manière, des hommes vexés s’attaquent aux Directeurs. Sans doute, en arrière-plan, des difficultés politiques réelles, surtout d’ordre militaire, justifient des critiques. Elles peuvent se comparer aux problèmes économiques d’aujourd’hui. Mais à cette époque aussi, les attaques personnalisées manquent de hauteur (corruption supposée de REUBELL, délire sectaire de LAREVELLIERE-LEPEAUX, vanité hautaine de MERLIN DE DOUAI)

Le 9 Juin, SIEYES remplace le Directeur REUBELL. Le 16 Juin, l’élection du Directeur TREILHARD est invalidée. Le 18 Juin, les Directeurs MERLIN DE DOUAI et LAREVELLIERE-LEPEAUX sont poussés à la démission. Le 15 Juillet, ces quatre hommes sont mis en accusation. Tous les quatre, de même que SIEYES, ont fait partie de l’Assemblée Constituante et de la Convention Nationale. Ils participent au combat politique depuis le début de la Révolution. Ils ont voté la mort du Roi Louis XVI sans sursis (sauf REUBELL, absent).

En dehors de SIEYES, les remplaçants n’ont pas l’expérience, la notoriété, l’influence et la clairvoyance voulues. Roger DUCOS, ex-conventionnel régicide, n’existe que par SIEYES. Le général MOULIN et GOHIER, sincèrement républicains, manquent d’envergure et de lucidité.

Parmi les initiateurs des attaques qui ont amené ces résultats, on trouve sans surprise des hommes comme BOULAY de la MEURTHE (futur Comte et Conseiller d’Etat) et FRANÇAIS de NANTES (futur Comte, Préfet et Conseiller d’Etat), qui sont des opportunistes, futurs séides de Bonaparte. Ceux-là cherchent à se faire une place.

Mais on trouve aussi des républicains de premier plan comme BERTRAND-LHODISNIERE, GENISSIEU et LAMARQUE, pourtant alliés naturels des Directeurs remplacés. Tous trois, anciens Conventionnels régicides, et de très nombreux républicains avec eux, se trompent tragiquement de cible. Ils contribuent à la chute des Directeurs parce que les Conseils (CINQ-CENTS et ANCIENS) n’ont pas assez de pouvoir. Mais quatre mois plus tard, ils lutteront de toutes leurs forces, sans espoir, contre le Coup d’Etat de Bonaparte au 19 Brumaire. Et les Conseils sont dissous…

La dictature bonapartiste chercha à écraser les Républicains indomptables. Elle sut séduire, voire corrompre les autres. Les complicités de Bonaparte étaient immenses et puissantes. Cependant, risquons une hypothèse : un homme comme LAREVELLIERE-LEPEAUX, resté au Directoire, pouvait se révéler un obstacle insurmontable.

A l’époque, les Républicains, divisés, consacrent plus de temps à s’autodétruire qu’à circonscrire la menace qui plane.

Ne peut-on pas en dire autant des progressistes d’aujourd’hui ? Il faut être aveugle pour ignorer que ces comportements irresponsables d’enfants gâtés et de divas favorisent le Front National.

Deux listes de 17 conventionnels face à face

HERAULT-DE-SECHELLES

Au 20 Brumaire An VII (10 Novembre 1799), dix sept ex-Conventionnels sont compris dans la proscription qui frappe les députés opposants au Coup d’Etat. Dix sept ex-Conventionnels, complices du Coup d’Etat, proscrivent (entre autres) dix-sept de leurs anciens collègues.

Qui trouve-t-on dans ces listes ?

Parmi les opposants, à part GARRAU et LESAGE-SENAULT, ex-Montagnards passés à travers les mailles des répressions, beaucoup appartenaient à la Gironde modérée mais républicaine tels FRONTON-DUPLANTIER, QUIROT, POULLAIN-GRANDPREY, BERTRAND-LHODIESNIERE. D’autres siégeaient dans le Marais à la Convention avant de se révéler tardivement franchement républicains comme LEGOT et BORDAS par exemple.

Enfin, notons la présence surprenante d’ex Thermidoriens. Leurs positions étaient évolutives, voire opportunistes, à la Convention. Aujourd’hui, ils font face. GOUPILLEAU-MONTAIGU est de ceux-là.

Presque tous sont harcelés, voire persécutés, à partir du Coup d’Etat. Tous sont espionnés. Treize sur dix-sept rentrent dans la vie privée, dont TALOT  et BERTRAND-LHODIESNIERE, qui refusent avec hauteur toutes les propositions de postes, grades et gratifications. Plusieurs (5) sont mis en résidence surveillée ou condamnés à l’exil intérieur. D’autres (4) sont arrêtés et séjournent en prison. Plusieurs cumulent peines et vexations.

 

Mais nécessité fait loi pour ceux (4) qui n’ont pas les revenus ou le patrimoine qui auraient permis de conserver toute sa dignité. BORDAS rentre au Ministère de la Justice, LEGOT dans l’administration fiscale, GARRAU dans l’Armée. L’exemple le plus frappant est celui de JOUBERT de l’Hérault, qui à peine proscrit, fait allégeance et obtient un poste modeste dans l’administration militaire. « Les citoyens qui en sont chargés (du Gouvernement Provisoire-NDR) offrent aux Républicains une garantie irrécusable ». Cette humiliation ne lui porte pas bonheur. Il meurt après deux mois d’agonie en 1812 lors de la retraite de Russie.

 

Ceux qui se sont opposés au 19 Brumaire méritent en tous cas le respect. Notons que ne figure parmi eux aucun personnage de premier plan. Mais ces hommes se sont battus sans espoir pour la Liberté, invoquant la Loi devant les bayonnettes de Bonaparte. En outre, à la persécution du Consulat et de l’Empire a succédé pour beaucoup celle de la Restauration. Leur vie à tous a basculé ce 19 Brumaire. Aucun d’entre eux ne vivra l’avènement de la IIè République.

 

Les dix sept ex-Conventionnels complices du Coup d’Etat forment eux un groupe plus diversifié. Notons tout d’abord que des célébrités de l’époque et encore de nos jours figurent parmi eux. Ils ont en effet occupé des postes importants avant le 19 Brumaire.

A la Convention, sept ont été membres du Comité de Salut Public, trois du Comité de Sûreté générale, quatre du comité de Législation et deux de la Commission des Onze (qui a préparé la Constitution de l’An III). Surtout, cinq ont eu l’immense responsabilité de présider la Convention (CHENIER, DAUNOU, MATHIEU, LALOY et VERNIER).

Ensuite, là aussi, observons que leur positions politiques ont été très diverses. Par exemple, lors du Procès de Louis XVI, quatre avaient voté pour l’extrême sévérité, sept avaient choisi les votes les plus indulgents, deux avaient opté pour des votes intermédiaires. Quatre ne siégeaient pas encore en Janvier 1793.

Notons enfin que cinq d’entre eux ont favorisé et soutenu le Coup d’Etat du 18 Fructidor An V (4 Septembre 1797) qui avait neutralisé la menace Royaliste sous le Directoire. Ils ont eu alors le courage de se compromettre contre le pouvoir personnel.

Arrive le 20 Brumaire auquel ils prêtent main forte. En récompense de leurs services, sept complices rentrent au Tribunat, cinq au Sénat, quatre au Corps Législatif, un devient Préfet. Bien.

Mais les choses se compliquent et l’épuration commence. Des sept complices membres du Tribunat, six sont exclus en 1802, le septième en 1804 ! Des quatre complices membres du Corps Législatif, l’un est exclus en 1802, un deuxième en 1803, un troisième en 1806 ! Les cinq complices membres du Sénat sont plus dociles : un seul est disgracié en 1808. Au total, onze complices sur dix-sept déplaisent au fil du temps au nouveau pouvoir. Quelques uns s’humilient encore d’avantage et reviennent en grâce comme CHAZAL (Préfet) ou GIROT-POUZOL (Sous-Préfet). Mais d’autres, à leur tour – hélas, trop tard – s’enveloppent dans leur manteau et rentrent dans la vie privée. Cela dit, ils ne sont pas persécutés comme les opposants au 19 Brumaire. Les plus serviles conservent leurs charges et deviennent Chevaliers (deux), Barons (deux) ou Comtes d’Empire (quatre). Deux de ces « fondateurs » puis fossoyeurs de la République seront même Pairs de France sous Louis XVIII !

 

Que conclure ? D’abord que de nombreux complices du Coup d’Etat, pourtant a priori bien informés, ont été victimes d’un formidable mirage politique. Que des hommes comme CHENIER, DAUNOU, LALOY et MATHIEU aient pu croire que Bonaparte préserverait les libertés si chèrement acquises montre qu’avant d’être Empereur, Napoléon était déjà roi de la propagande. Que Bonaparte a su diviser les Républicains pour installer sa dictature. Qu’au fil des années, il a proscrit la moindre velléité d’indépendance d’esprit. Qu’enfin, ceux qui sont restés « sages », couverts d’or et de broderies, ne lui ont été d’aucune utilité le moment venu où le courage et l’énergie étaient si nécessaires, en 1813.

Les grands Conventionnels manquaient tous à l’appel.

 

De l’huile sur le feu

04-NIVOSE

L’imbroglio règne au Moyen Orient depuis des décennies. Les USA envahirent l’Irak qui avait envahi autrefois le Koweit. Les USA eurent l’appui des monarchies du Golfe et Saddam Hussein fut abattu.

Mais ensuite le chaos s’installe en Irak à l’instar de l’Afghanistan qui a subi également l’intervention occidentale.

La Libye de son côté traverse une période d’anarchie violente depuis la chute de Kadhafi à la suite d’une autre intervention occidentale.

Là-dessus intervient le printemps arabe avec quelques résultats éloquents : l’Egypte retombe en dictature et la Syrie est déchirée. Bachar El Assad fait face d’abord a une opposition laïque progressiste qu’il parvient à écraser à grands renforts de massacres et tortures.

 

Au Moyen Orient aujourd’hui, tout est imbriqué et presque incompréhensible quand on intègre à la réflexion l’Iran chiite, les moyenâgeuses et théocratiques monarchies sunnites, la division de l’Irak et de la Syrie entre ces deux faces de l’Islam, le Kurdistan, le Hezbollah libanais, et le dernier arrivé : DAECH, l’Etat Islamique, avec en toile de fond pétrole et terrorisme.

Entre tous ces acteurs aux intérêts si divergents, aux idées, cultures et fanatismes si éloignés de notre univers démocratique, ces acteurs qui rivalisent de barbarie, qui invoquent la religion musulmane à tout propos, faut-il vraiment chercher un bon face aux méchants ?

 

Or, des puissances occidentales dont la France, envoient des armes perfectionnées aux kurdes.

Cette décision n’a pas été discutée. Il est temps d’en parler et de se poser au moins trois questions

Faut-il intervenir ?

Faut-il envoyer des armes ?

Pourquoi aux Kurdes ?

 

Les interventions précédentes ont montré leurs limites, d’abord parce que des arrière-pensées immondes (pétrole et reconstruction) ou des mensonges cyniques (armes de destruction massives) ont entaché leur sincérité, ensuite parce que des violences sans sont suivies. Mais enfin, les motifs paraissaient légitimes. Au vu des résultats cependant, il y aurait lieu d’appliquer désormais le précepte de DANTON énoncé le 13 Avril 1793 : la République Française ne s’immisce pas dans les affaires d’autres nations… sauf si elle est agressée.

 

En dépit de ce sage décret, aujourd’hui, la France invoque la menace terroriste de DAECH et intervient. Soit.

Mais alors, que la République conserve la maîtrise de ses actions militaires, sur la base de raids aériens, sans envoi de troupes au sol. (Un enlisement militaire meurtrier est toujours à craindre.). Au-delà, les démarches diplomatiques devraient viser à priver DAECH de ses anciens soutiens financiers, logistiques et militaires. Et c’est là que les monarchies du Golfe ont une immense responsabilité, elles qui ont caressé le serpent qui les menace aujourd’hui.

Que ces monarchies fassent le nécessaire. Qu’elles arment et forment des combattants. Les Occidentaux peuvent appuyer ce projet mais non pas figurer en première ligne.

 

Pourtant, la France envoie des armes « perfectionnées »

L’envoi d’armes soulage peut-être les consciences bouleversées par les images de décapitation. Mais pour ces quelques assassinats barbares, il ne faudrait pas provoquer un bain de sang. En outre, une arme passe aisément à l’ennemi. DAECH a pillé les dépôts militaires Irakiens. En Lybie, des armes fournies par les Occidentaux sont passées entre les mains de clans terroristes. Alors envoyer des armes dans un tel contexte, c’est jouer à la roulette russe.

 

Les Kurdes bénéficient donc de ces envois. Pourquoi eux, dont la principale organisation, le PKK est classée comme terroriste par les USA ? Parce que, dira-t-on, eux seuls luttent contre DAECH. Mais qui ne sait que le but des Kurdes est l’indépendance du Kurdistan qui s’étend sur quatre pays, de l’Iran à la Turquie en passant bien sûr par la Syrie et l’Irak. Le but des Kurdes n’est de lutter contre DAECH que dans la mesure où le Kurdistan est partiellement occupé. Demain, les Kurdes cesseront le combat si le Kurdistan est libéré. De ce point de vue, DAECH a tout intérêt à se cantonner aux zones non kurdes de Syrie et d’Irak.

 

A terme, outre l’hypothèque sur le devenir des armes, se posera inévitablement la question de l’indépendance kurde avec revendications territoriales, perçues nécessairement comme agressives. Aujourd’hui, l’Occident, en permettant aux kurdes de légitimer à bon compte leur indépendance, prépare de nouvelles guerres, de nouvelles misères et de nouvelles barbaries.

La résolution du 19 Brumaire An VIII

06-VENTOSE

Bonaparte a tué la République. La première manifestation officielle du nouveau régime se présente sous la forme d’une résolution. A cet égard, il importe d’examiner cette résolution, approuvée par ce qui reste du Conseil des Cinq Cents dans la nuit du 19 au 20 Brumaire. Après un rapport de BOULAY de la Meurthe, complice du coup d’état, la résolution est justifiée par la nécessité d’un nouvel état de choses « provisoire et intermédiaire ». La scène se déroule bien après minuit, si l’on en croit le Moniteur.

 

L’Article 1er stipule : « Il n’y a plus de Directoire, et ne sont plus membres de la représentation nationale, pour les excès et les attentats auxquels ils se sont constamment portés, et notamment, le plus grand nombre d’entre eux, dans la séance de ce matin, les individus ci-après nommés. » Suit une liste de soixante deux députés.

 

Plusieurs remarques s’imposent.

D’abord, cet Article 1er parle de choses très différentes. A la réflexion, la phrase : « Il n’y a plus de Directoire », devait constituer un Article à elle seule. L’annonce en SEPT mots de la fin d’un régime politique le méritait. L’événement est tout sauf anodin.

Mais les nouveaux maîtres travaillent dans la précipitation, par crainte d’un soulèvement des faubourgs. Ainsi, à une annonce politique majeure, ils sont pressés d’ajouter ce qui s’apparente à une liste de proscription. La cohabitation de ces deux niveaux de préoccupation altère la solennité recherchée et traduisent leur anxiété, presque leur peur physique. On sait que SIEYES avait préparé ses voitures pour échapper aux républicains  en cas d’échec du coup d’état.  Dans le même article donc, il est question de Pouvoir Suprême et de basse besogne répressive.

Ensuite, l’imprécision, le vague et le flou frappent l’esprit : « le plus grand nombre », « notamment », « les excès et les attentats ».

Quel est leur crime principal? Quels autres crimes ont-ils commis ? Qui précisément a fait quoi ? Rien ne le dit. Tout cela laisse planer un parfum de panique.

Enfin, on peut tenter l’hypothèse de la fatigue générale pour expliquer ces erreurs manifestes de communication. L’essentiel était de prendre date et de parer au danger le plus pressé. Il n’empêche que les conjurés trahissent leur angoisse en confondant vitesse et précipitation.

 

D’autant que cette résolution comprend au total 16 articles. L’Article II nomme SIEYES, ROGER-DUCOS et BONAPARTE Consuls de la République Française. L’Article III leur donne « la plénitude du pouvoir directorial », c’est-à-dire tous pouvoirs sans limite ni notion de durée. D’autant que selon l’Article V, « Le Corps Législatif s’ajourne au 1er Ventôse prochain (20 Février NDR) ; il se remettra de plein droit, à cette époque, à Paris, dans ses palais. » Donc, du 10 Novembre au 20 Février, soit pendant 100 jours à peu près, les Consuls se donnent les mains libres.

Le « de plein droit» est de nature à rassurer et rappelle le Serment du Jeu de Paume, par lequel les Constituants s’octroyaient la légitimité politique, où qu’ils se trouvent réunis. Evidemment, au 1er Ventôse, personne ne voudra, ou plutôt ne pourra, rappeler l’engagement des Consuls..

L’Article VIII indique : « Avant sa séparation et séance tenante, chaque Conseil nommera dans son sein une commission composée de 25 membres. »

Après quoi, vers quatre heures du matin, les complices du coup d’état rentrent à Paris.

Le matin du 20 Novembre, vers 9 heures, la résolution des Cinq Cents arrive en discussion au Conseil des Anciens. Apparemment seul, GUYOMAR, qu’on avait soigneusement évité de convoquer la veille, s’y oppose comme inconstitutionnelle. Piteusement, le Conseil des Anciens approuve la résolution alors même qu’il avait voté peu avant pour un ajournement des Conseils au 1er Nivôse (20 Décembre NDR).

Après cette approbation, les Conseils nomment chacun dans la journée du 20 Brumaire une commission de 25 membres.

 

Au 20 Brumaire, l’Histoire place donc face à face deux listes de représentants du peuple; d’une part, les complices du coup d’état, d’autre part, les opposants à ce même coup d’état.

Cinquante députés composent les deux commissions provisoires de vingt cinq membres cooptés et validés par les Consuls. Parmi eux, figurent DIX SEPT  anciens membres de la Convention Nationale

La résolution du 20 Brumaire cite soixante deux noms d’opposants.

Parmi eux, pour son honneur, figurent DIX SEPT anciens membres de la Convention Nationale.